lundi 31 octobre 2011

Chapitre 17 de Limonade - Episode 10

Dès que le libraire eut quitté les lieux, Fabrice se tourna vers son ami. Un demi-sourire éclairait son visage lorsqu’il demanda :
— Tu ne m’as toujours pas raconté comment Gwen a fait pour t’empoisonner.
— Mais si je te l’ai dit, elle a versé une potion d’oubli dans mon thé.

L’adolescent soupira ostensiblement lorsque le visage de Corentin se rembrunit. Cette réaction lui apporta la certitude que ce dernier ne lui avait pas raconté toute l’histoire.
— Merci, ça j’avais compris.
— Ben alors, pourquoi tu…
— Ce que je veux savoir, l’interrompit-il d’une voix assez forte pour couvrir ses protestations, c’est dans quelles circonstances c’est arrivé. Tu m’avais dit que tu ne la voyais plus depuis la rentrée.
— Elle m’a envoyé un mail, concéda le benjamin du bout des lèvres.
— Et c’est tout ?

En désespoir de cause, Corentin finit par relater ses retrouvailles avec Gwenaëlle en passant sous silence leur conversation en dehors du café. A mesure qu’il parlait, le sourire de son compagnon s’élargit.
— Mais pourquoi tu te marres ?
— Tu avais un rencard avec Gwen !
— Non, c’était un piège, pas un rencard ! Et puis, je te rappelle que c’est ton ex, tu ne devrais pas avoir l’air aussi content pour moi.

Fabrice haussa les épaules. En vérité, il se sentait soulagé que son ami parvienne à tirer ses sentiments pour la jeune fille au clair. Cela atténuait sa culpabilité de l’avoir abandonnée juste avant les vacances alors que deux des membres de sa famille venaient d’être hospitalisés.

Un point demeurait cependant obscur à ses yeux.
— Dis-moi, comment tu as découvert qu’elle avait ajouté quelque chose dans ton verre ?
— J’ai eu une vision.
— Je sais, mais tu m’as aussi raconté que tu n’as pas cru à cette prémonition.

En fin de compte, faire passer Corentin aux aveux se révélait bien plus drôle que Fabrice ne l’aurait imaginé. Bien que ce soit inconscient, son ami faisait tout un cinéma, regard fuyant, rouge aux joues et autres trémoussements, lorsqu’il le questionnait sur des sujets inconfortables.

vendredi 28 octobre 2011

Chapitre 17 de Limonade - Episode 9

En descendant de moto devant la Table d’Hermès, la libraire ésotérique dont le site Internet assurait la présence des ouvrages sur la mémoire, les deux garçons eurent un temps d’hésitation.
— Je ne m’attendais pas vraiment à ça, commença Corentin.
— Moi non plus, renchérit son ami, étonné de la présence d’un présentoir dédié au régime Okinawa juste derrière la vitrine.

Malgré son étonnement, Fabrice franchit la porte en premier. L’odeur d’encens et de tisane qui flottait dans la boutique était si intense qu’elle en devenait écœurante. Ce parfum aurait davantage convenu à une cave obscure qu’à la pièce où il se trouvait.

Au premier plan, une nuée d’ouvrage de diététique promettait une vie plus saine grâce aux plantes tandis qu’une étagère croulait sous les plantes en sachets et les produits d’artisanat tibétain.
— Soyez les bienvenus, le salua depuis le comptoir un homme d’une quarantaine d’année au visage mangé d’une barre poivre et sel.

Vaguement intimidé par le regard méprisant du libraire, l’adolescent marmonna une réponse vague avant de s’enfoncer entre les rayonnages de livres. Lorsque Corentin le rejoignit au fond de la pièce, il ne put s’empêcher de persifler à voix basse :
— Et dire que tu avais peur de tomber sur un repaire de New-Age.
— Chut ! On est venu ici pour les bouquins.

Ravalant ses sarcasmes, Fabrice commença à parcourir les tranches des livres alignés sur tout un pan de mur. Bien que les titres présentés soient davantage portés sur l’occulte que ne le laissait penser la devanture de la boutique, les ouvrages qu’ils cherchaient restaient invisibles.
Le pouvoir des runes, c’est pas un truc qui pourrait t’intéresser ?
— Si, répondit son compagnon en retournant le livre en question, mais il est largement hors de mes moyens.

Avec une expression à la fois méfiante et curieuse, le libraire surveillait les deux adolescents occupés à fouiner parmi sa bibliothèque.
— Vous cherchez quelque chose ? demanda-t-il sans conviction.
— Oui, répondit Corentin en sortant la liste de sa poche. Vous auriez La résilience mémorielle ou La magie des minéraux et des végétaux ?

Devant le regard surpris de son interlocuteur, il ajouta :
— C’est pour l’anniversaire de ma tante, elle est passionnée par tous ces trucs.
— Je vais aller voir si j’en ai encore en réserve.

mercredi 26 octobre 2011

Chapitre 17 de Limonade - Episode 8

La négligence avec laquelle Corentin avait jeté le livre sur l’oreiller en disait long sur le manque d’intérêt de son contenu. Le titre en paraissait pourtant prometteur : Influence des plantes sur la mémoire.
— Tu n’as rien trouvé là-dedans ? demanda son compagnon.
— Non, ils expliquent plus ou moins quels sont les ingrédients à mettre dans une potion et leurs effets. Sauf qu’ils n’expliquent pas comment c’est possible d’y résister.
— Et tu as une autre piste ?

Après un hochement de tête affirmatif, l’adolescent quitta le lit pour ramasser un morceau de papier sur son bureau. Il gribouilla l’une des lignes, puis le tendit à Fabrice.
— Je suis allé faire un tour sur le net, expliqua-t-il, et j’ai trouvé une liste de livres en rapport avec les sortilèges et les élixirs d’oubli.

A son tour, Fabrice examina les titres énumérés sur la feuille.
— Il reste juste deux livres, La résilience mémorielle et Du souvenir à l’oubli, la magie des minéraux et des végétaux que tu n’as pas barré. Tu as lu tous les autres ?
— Oui, et mes recherches n’ont pas été concluantes, soupira Corentin.

D’un regard las, il balaya les ouvrages éparpillés au pied de son lit et sur son bureau.
— J’ai peur que ce soit encore des trucs New-Age…
— Mais s’il y a des infos utiles, tu vas en avoir besoin.

Cette perspective sembla insuffler un peu d’optimisme dans la carcasse dégingandée de l’adolescent. Celui-ci se mit à faire les cent pas dans sa chambre jusqu’à ce que son ami l’arrache à ses réflexions.
— Je suppose que ce n’est pas le genre de bouquins qu’on trouve à la bibliothèque.
— Non. Une librairie dans le centre est sensé en avoir et…
— Je t’y emmène, l’interrompit Fabrice, impatient de se rendre enfin utile.

lundi 24 octobre 2011

Chapitre 17 de Limonade - Episode 7

Un sourire un brin vengeur retroussa la bouche de Corentin.
— De toute façon, je n’avais pas vraiment envie de l’aider, celui-là.
— Sur ce point, on est d’accord !

Plutôt que de laisser la glace se reformer entre eux, Fabrice prit son courage à deux mains.
— J’ai pas non plus été très sympa avec toi. Je n’aurais pas dû parler de tes dessins aux autres.
— C’est pas important…
— Alors qu’est-ce que tu trouves important ?

La question, prononcée sur un ton vibrant d’incompréhension et de colère, fit écarquiller les yeux de l’adolescent. La légère rougeur qui entourait l’iris bleuté de Corentin trahissait des larmes contenues. Il se moucha en silence, puis ramena ses genoux contre sa poitrine.

— Mais, qu’est-ce qui s’est passé ? s’inquiéta Fabrice devant une détresse aussi visible.
— Gwen est vraiment une sorcière, hoqueta son ami.

Au lieu de l’enfoncer en affirmant qu’il s’agissait d’une évidence, l’adolescent lui posa une main sur l’épaule. Il aurait pourtant voulu faire davantage, mais un sentiment de gêne l’en empêchait.
— Elle a essayé de m’empoisonner, continua Corentin en étouffant ses pleurs.
— Comment ça !
— J’ai une vision d’elle en train de verser une potion dans mon thé, mais j’ai pas voulu y croire…
— Et tu as bu la potion ?

Effondré, Corentin hocha la tête.
— Pourtant, tu n’es pas malade ?
— Non, c’était pas un poison. Gwen voulait juste que j’oublie tout ce qu’elle m’avait raconté.

La crise de larmes étant passée, Fabrice s’écarta de son ami. Bien qu’il se réjouisse que son compagnon ait fini par admettre la vérité sur Gwenaëlle, son chagrin faisait peine à voir. Un point restait néanmoins en suspend.
— Comment tu te souviens ce qu’elle a fait si tu as bu sa potion d’oubli ?
— Je ne sais pas, c’est pourquoi j’étais en train de chercher une réponse dans les livres de ma tante.

vendredi 21 octobre 2011

Chapitre 17 de Limonade - Episode 6

De plus en plus surpris, le nouveau venu s’efforça de gommer le masque d’étonnement qui déformait ses traits. Prenant un air dégagé, il entra dans la chambre de Corentin.
— C’est un truc de famille ? demanda-t-il.
— Quoi ?
— Deviner qui est derrière la porte.

Corentin replia ses longues jambes qui occupaient tout l’espace de son lit.
— Ta moto fait un boucan de tous les diables. On l’entend venir de loin, et l’escalier grince.
— Ok, j’ai compris.

Mine de rien, Fabrice dut admettre qu’il était un peu déçu qu’aucune magie ne soit à l’œuvre. Il se laissa tomber aux côtés de son ami sur la couette bleue aux motifs géométriques.
— Fais attention au chat, l’avertit ce dernier.

La mise en garde arriva cependant trop tard. Le renflement sous les couvertures émit miaulement indigné avant de se frayer un passage jusqu’au pied du lit.
— Ca lui apprendra, à cette sale bête, maugréa Fabrice qui n’avait pas échappé à un coup de griffes.

La sale bête en question feula à l’attention de l’intrus, puis s’enfuit par la porte entrouverte.
— Qu’est-ce que tu veux ? s’enquit Corentin en reposant sur l’oreiller le livre qu’il était en train de lire.
— M’excuser pour hier.
— Oh, c’était pas si important.

La désinvolture de l’adolescent ressemblait davantage de l’abattement qu’à de l’indifférence. Curieux d’en connaître la cause, Fabrice insista :
— Quand même, tu t’es fait salement insulter par mon pote.
— Je ne suis pas sûr qu’il pensait vraiment ce qu’il m’a dit. Il y avait une ombre sur lui.
— Tu veux exorciser Moucky ? demanda-t-il, incrédule.

Surpris par le ton de sa voix, Corentin le dévisagea.
— Tu penses que ça serait une bonne idée ?
— Non !

Plus que de faire subir une douche froide à son ancien acolyte, Fabrice craignait que davantage de magie ne répandre des rumeurs déplaisantes sur son ami. Une pointe de jalousie venait se mêler à son inquiétude pour la réputation du garçon.

mercredi 19 octobre 2011

Chapitre 17 de Limonade - Episode 5

L’adolescent avait moins de mal à feindre la colère que l’indifférence. Les sentiments d’Anne-So à son égard étaient évidents et il culpabilisait de les utiliser de la sorte. Il s’était cru assez fort pour arriver à obtenir davantage d’informations sur le fameux club d’histoire et son professeur, mais il n’avait plus le courage de continuer ainsi.

Abandonnant là sa compagne, Fabrice dévala les marches du palais sans un regard en arrière. Il courut presque pour récupérer sa moto, puis se hâta de démarrer. Avec un vrombissement agressif, son véhicule se faufila dans les rues encombrées du centre-ville.

Alors qu’il approchait de l’embranchement en direction de Saint-Jacques, Fabrice hésita. Si rentrer maintenant chez lui revenait à passer une soirée de plus à ruminer son sentiment de culpabilité, il préférait encore rester à Rennes. Il réalisa alors que, en dépit de ses intentions, il n’avait toujours présenté aucune excuse à Corentin pour son comportement de la veille.

D’un coup de volant, il quitta la voie de sortie pour se diriger vers la rue Courteline. Grace à l’habitude, il trouva tout de suite où se garer devant le domicile de la tante de son ami. Pourtant, au moment de sonner à la porte, il s’interrogea sur le bien fondé de sa venue. Après tout, il risquait de déranger les occupants du pavillon.

En guise de réponse, la porte d’entrée s’ouvrit sur la silhouette fine d’Evelyne.
— Mais entre donc Fabrice ! Tu ne vas pas rester planté ici toute l’après-midi.

Impressionné malgré lui, l’adolescent traversa le jardin et referma la porte derrière lui.
— J’avais peur de vous déranger, s’excusa-t-il auprès de la voyante qui, une tasse de café à la main, le regardait en souriant.
— Je ne travaille pas le dimanche, et mon neveu est déjà rentré. Je suppose que c’est lui que tu es venu voir.

Fabrice acquiesça, puis monta directement jusqu’au grenier. Il arriva essoufflé devant la porte close de la chambre de son ami.
— Tu peux entrer, cria celui-ci depuis l’intérieur de la pièce.

lundi 17 octobre 2011

Chapitre 17 de Limonade - Episode 4

La voix de sa compagne ramena immédiatement Fabrice à ses préoccupations initiales.
— Le sortilège peut être brisé. La preuve, même un amateur a réussi à te libérer de son emprise.

L’adolescent se garda bien de la contredire. Il avait la nette impression que, tant que les sorcières du lycée Notre Dame ignoraient l’existence de Corentin et ses pouvoirs, son ami aurait plus de chances de les tenir à distance.

Ravalant ses scrupules, il incita Anne-Sophie à en révéler davantage :
— C’est pas un banal charme d’amour que Gwen a utilisé sur moi. Entortiller deux mèches de cheveux ou écrire un prénom sur un bout de papier, c’est des conneries.
— Oui, elle a utilisé de la vraie magie.
— Comment tu sais tout ça ?

À nouveau, la jeune fille rougit et bafouilla :
— Je l’ai entendu en parler avec sa copine, Émilie. Je ne savais pas ce qu’elles préparaient.

Même si l’innocence d’Anne-So ne faisait aucun doute pour lui, Fabrice haussa un sourcil interrogateur. Si sa compagne avait utilisé un sortilège d’amour sur lui, elle se serait assurée d’en être la bénéficiaire.
— C’est sûr que c’est trop bizarre, gloussa-t-elle. De la vraie magie, c’est n’importe quoi !
— Dommage, répliqua l’adolescent avec une expression grave, je commençais à y croire.

Sur ses mots, il dégagea sa main de l’étreinte de la jeune fille. En silence, il se leva du banc, ramassa les deux casques posés sur le sol et s’apprêta à retrouver sa moto.

Toujours assise, Anne-Sophie lui jeta un regard effaré.
— Attends ! lui cria-t-elle avant qu’il ne sorte de la galerie.

Plusieurs personnes la dévisagèrent, l’air tantôt intrigué et tantôt moqueur, quand elle se leva en vitesse pour rejoindre Fabrice. Sa démarche maladroite et le claquement sec de ses talons firent naître quelques sourires sur les visages des spectateurs.

Lorsqu’elle arriva à proximité, Fabrice déclara, très calme :
— Tu reproches à Gwen de me mentir et de vouloir me manipuler, mais dans le fond tu es pareille. Tes histoires de sortilèges et de vraie magie, ce n’est qu’un tissu de mensonges.
— Pas du tout !
— Je ne veux plus entendre parler de ça ! Je ne sais pas ce que tu essayes de faire, mais ça ne marche pas avec moi !

vendredi 14 octobre 2011

Chapitre 17 de Limonade - Episode 3

Avant même que l’adolescent ne pose sa première question, la jeune sorcière le prit de vitesse.
— Tu m’as proposé ce rendez-vous uniquement pour récupérer ton casque, ou tu avais autre chose en tête ?
— Je pense que ça ne va pas te plaire, répondit-il dans un soupir, mais je crois que je suis encore amoureux de Gwen.

La ruse de Fabrice fonctionna au-delà de ses espérances. Anne-Sophie bondit sur ses pieds, les poings serrés par la colère.
— Mais tu n’as pas encore compris qu’elle se sert de toi !

Il répondit à cette accusation par un regard triste et vaguement interrogateur.
— Pourquoi elle ferait ça ?
— Parce que c’est une petite garce ! Dès qu’elle apprend quelque chose, elle l’utilise pour faire du mal, pour gagner en pouvoir !

Fabrice se permit un léger sourire. D’une main, il saisit le bras de sa compagne pour l’inciter à se rasseoir.
— Anne-So, je ne comprends rien du tout à ce que tu racontes…
— Souviens-toi, bon sang ! Au téléphone, tu m’as dit que tes sentiments pour Gwen avaient disparu quand ce garçon bizarre t’avait jeté un sort.
— J’ai pas envie de parler de ça, se plaignit l’adolescent, sincèrement inquiet à l’idée de mêler Corentin à cette affaire.

Anne-Sophie lissa les plis de sa jupe, puis elle déposa sa bourse sur ses genoux.
— Écoute-moi bien, parce que ce je vais te raconter est un secret, commença-t-elle en baissant la voix. Je suis presque sûre que Gwen a utilisé un charme d’amour sur toi.

Imitant l’air ébahi de circonstance, Fabrice plongea ses yeux dans ceux de la jeune fille. Sur le coup, il n’avait pas réalisé qu’elle avait pris sa main dans la sienne, mais des ongles vernis s’enfonçaient désormais dans sa peau. Désireux de ne pas rompre le fil de confidence, il serra les dents et resta immobile.

Vus de l’extérieur, lui et Anne-So devaient sembler en plein flirt. Cette scène avait pourtant quelque chose d’improbable sous les dorures majestueuses et les murs austères de la galerie des pas perdus.

mercredi 12 octobre 2011

Chapitre 17 de Limonade - Episode 2

Une fois arrivé en haut de l’escalier, Fabrice se retourna pour observer la jeune fille avec davantage d’attention. Il ne devait pas perdre de vue que, bien qu’il la connaisse depuis des années, Anne-So était devenue une sorcière. La chaleur qui émanait de l’attrape-rêve de Charline contre son torse en était une preuve suffisante.

La tenue qu’elle avait revêtue pour leur rendez-vous ressemblait beaucoup à l’uniforme du lycée Notre-Dame, à la différence de sa couleur. Au lieu du bleu marine et du blanc cher à l’établissement catholique, elle ne portait que du noir. Des plis de sa jupe au col rond de son chemisier, aucun de ses habits ne dérogeait à cette règle, pas même le sac à main en forme de bourse qui rebondissait contre sa hanche.

En constatant qu’il la regardait avec intensité, Anne-Sophie battit des cils.
— Tu t’habilles toujours en noir ? demanda l’adolescent.
— Oui, c’est ma couleur préférée.

Fabrice se promit de questionner Corentin à propos de la symbolique des couleurs en magie, mais il avait déjà l’impression de connaître sa réponse. De la même façon, il ne pouvait s’empêcher de s’inquiéter du contenu du sac de sa compagne. La manière dont elle le couvait du regard lui faisait craindre le pire et il n’avait nulle envie de se retrouver engagé dans une seconde relation d’origine surnaturelle.

Le temps qu’ils franchissent les lourdes portes ouvragées du palais du parlement, ses pensées avaient retrouvé toute leur cohérence. Il avait choisi de revoir Anne-So afin d’en apprendre davantage sur Gwenaëlle et le cours de magie du lycée Notre-Dame.

Dès qu’ils furent à l’intérieur, Fabrice se laissa guider vers un banc situé sous l’une des hautes fenêtres de la salle des pas perdus. Bien qu’une faible lumière filtre des nuages, les ors de la galerie étincelaient.

lundi 10 octobre 2011

Chapitre 17 de Limonade - Episode 1

Moins d’une heure après le départ de Corentin, Fabrice prit congé de Charline et de Jérôme, son jeune frère. Les oreilles encore remplies des couinements électroniques du jeu de combat sur console auquel il avait joué avec Jérôme, il serrait entre ses doigts l’attrape-rêve réalisée par la jeune gothique. Comme elle le lui avait recommandé, il passa la lanière de cuir par-dessus son cou et glissa le pendentif sous son tee-shirt, le cercle de bois en contact avec sa peau.

Avec quelques minutes de retard, il arriva sur la place devant le palais du parlement. Sur les marches qui menaient à l’édifice, il reconnut la silhouette longiligne d’Anne-Sophie et il adressa un signe de la main. Elle le rejoignit aussitôt sur le bord du trottoir, un casque de moto éraflé à la main.
— Super ! s’exclama Fabrice avec une joie feinte. Tu as pensé à prendre mon casque.

Peu enthousiaste à l’idée de rester en extérieur sous un ciel lourd, il proposa à la jeune fille d’aller s’abriter à l’intérieur du bâtiment. Il laissa donc sa moto dans une rue perpendiculaire de peur que l’un des agents en patrouille devant de palais ne vienne confisquer son véhicule.

Fabrice eut tout juste le temps de boucler son antivol avant qu’Anne-So ne se mette à parler. Par chance, elle n’aborda aucun sujet en rapport avec la magie.
— Qu’est-ce que tu deviens depuis le collège ? demanda-t-il pour gagner du temps.
— Eh bien, je suis entrée à Notre-Dame, et maintenant je suis en terminale Eco.
— C’est vrai que tu as toujours été très forte en histoire.

La remarque accidentelle de l’adolescent eut un résultat inattendu. Les joues d’Anne-Sophie prirent une teinte cramoisie tandis que le reste de son visage demeurait blanc. Elle trotta un moment sur les pas de Fabrice sans autre son que le claquement des talons de ses bottes sur les dalles de l’esplanade.

dimanche 9 octobre 2011

Chapitre 16 de Limonade - The end

Encore un chapitre de Limonade supplémentaire qui vient de s'achever, ce qui amène le pourcentage d'avancée du roman à deux tiers. Il me reste donc huit chapitres à écrire avant de vous livrer les ultimes rebondissements de cette aventure.

En attendant, le chapitre 16 débute ici et, dès lundi prochain, vous aurez le premier épisode du chapitre 17.

lundi 3 octobre 2011

Chapitre 16 de Limonade - Episode 10

L’adolescent tâcha de remettre dans l’ordre dans ses pensées. Il ne parvenait pas accorder de crédit à ce qu’il venait de voir : Gwen en train de rajouter quelque chose dans sa tasse. Compte tenu de ses mines de conspiratrice et de la teneur de leur conversation, il aurait dû s’attendre au pire. Cependant, il ne pouvait admettre que son amie essaye de lui nuire. En tout cas, pas après de telles confidences.

— Ce n’est qu’une vision, affirma-t-il à son reflet dans le miroir. Rien ne prouve que Gwen veuille m’empoisonner.

En dépit de toute la conviction qu’il mettait dans ses paroles, Corentin retourna dans la salle avec une boule d’appréhension au creux de l’estomac.

En arrivant à la table, il constata immédiatement que la tasse qu’il avait laissée vide était à présent pleine de thé.
— Il est bon à boire, tu sais, déclara Gwenaëlle avec un sourire d’ange.

Les recoupements entre sa vision et la scène qui se déroulait sous ses yeux achevèrent de plonger Corentin dans l’hébétude la plus complète. Il se rassit en silence, les yeux rivés sur le liquide brun-rouge, puis releva la tête en direction de son amie.

Un seul regard sur le visage de Gwenaëlle suffit à dissiper son appréhension. L’adolescent porta la tasse à ses lèvres et avala d’un trait le thé qu’elle contenait. A son corps défendant, il lui trouva un goût étrange, mais attribua cette saveur âcre aux réflexions qui agitaient son esprit.

Lorsqu’il reposa la tasse sur sa soucoupe, soulagé d’avoir fait le bon choix, il perçut une émotion similaire dans les yeux de son amie.
— Merci de m’avoir crue, dit-elle avec un sourire triste.