lundi 28 février 2011

Chapitre 12 de Limonade - Episode 6

Évelyne se déplaça dans son antique Peugeot jusqu’au lycée Jean Lurçat. Elle récupéra son neveu complètement ensommeillé à l’infirmerie, puis le ramena à son domicile. En chemin, elle s’inquiéta :
– Qu’est-ce qui t’arrive ?
– Je me sens mal. Comme si ma tête allait exploser ou ma peau se déchirer…
– Mets ça, dit-elle en désignant un bracelet accroché au rétroviseur intérieur.

Trop sonné pour réfléchir, Corentin obéit. Il eut un mouvement d’hésitation en se rappelant le bracelet maudit que sa tante avait donné à Fabrice. Cependant, il passa quand même l’entrelacs de fils de couleur et de perles vert pâle à son poignet droit.

Il se sentit soudain beaucoup mieux. La part rationnelle qui subsistait dans son esprit attribua sa guérison au remède de l’infirmière, mais il avait la certitude que le grigri en était la cause réelle. Avec un sourire aux accents inquiets, Évelyne demanda :
– Ça va mieux ?

Il acquiesça et profita de la fraîcheur de la vitre contre son front. Sans intérêt particulier, il observa les véhicules immobilisés dans les embouteillages de la fin de journée. À sa gauche, sa tante ne cessait de marmonner tandis qu’elle s’efforçait de slalomer entre les voitures.

Lors d’un virage brusque, l’adolescent nota qu’elle portait un bracelet similaire au sien. Il comprit alors qu’il n’était pas le seul à percevoir les mauvaises vibrations qui l’entouraient.
– Qu’est-ce qui s’est passé ?
– Je ne sais pas encore. Quelqu’un dans notre entourage court un grave danger.

Cette affirmation assécha en un instant la bouche de Corentin.
– Qui ? demanda-t-il.
– Je l’ignore, mais comme c’est une personne que nous connaissons tous les deux, le recoupement sera plus rapide.

Oppressés par ce sentiment de malheur indéfinissable, ils achevèrent le trajet dans le silence le plus complet.

Une fois dans son pavillon, Évelyne laissa Corentin reprendre ses esprits dans la cuisine tandis qu’elle épluchait son carnet d’adresses.
– Appelle les Gennec, la supplia-t-il.

Elle monta à l’étage afin de téléphoner aux voisins de sa sœur pendant que son neveu sirotait une tisane de thym au goût déplaisant.

vendredi 25 février 2011

Chapitre 12 de Limonade - Episode 5

La vive satisfaction que Corentin éprouvait suite au revirement de Charline se teintait néanmoins d’inquiétude. Les ombres qu’il avait couchées sur le papier lui avaient paru menaçantes ; il ignorait la méthode à employer pour les faire disparaître. Pourtant, il n’avait guère le choix. Comme l’avait déclaré la jeune fille, il devait réussir un second exorcisme afin de sauver son amie.

Quand son professeur de mathématique débuta la leçon consacrée aux fonctions, il ne put s’empêcher de fixer le tableau. Aux explications de monsieur Joly se superposaient celles de Fabrice et, pour la première fois depuis septembre, elles lui parurent limpides. Il s’efforça de compléter ses connaissances, puis de résoudre les exemples.

Ce cours se déroula à une vitesse peu commune, mais les suivants retrouvèrent un rythme ennuyeux.

Au fur et à mesure de l’avancée de la journée, une impression désagréable envahit Corentin. Ce malaise était trop diffus pour lui apporter davantage qu’un sentiment lugubre. Pendant son cours de français, il essaya en vain de mettre des traits sur ce qu’il percevait de façon indistincte. Hélas, il n’obtint qu’un fatras de lignes qu’il réussit à transformer en un dragon, à la joie d’Aurélien qui récupéra le dessin.

La dernière heure de la journée fut la pire. Son pressentiment s’accentuait, tout en restant hors de portée. Des frissons parcouraient sa peau comme des arcs électriques, hérissant tous les poils de son corps. Son crâne lui semblait s’alourdir de minute en minute et il finit par demander à son professeur la permission de se rendre à l’infirmerie.

Il devait avoir l’air véritablement malade, car Aurélien fut prié de l’accompagner. Ce dernier porta même son sac, tellement l’adolescent paraissait à bout de force. Ne sachant que faire de lui, l’infirmière lui ordonna de s’allonger.
– Si tu es malade, dit-elle, il vaut mieux que tes parents viennent te chercher.
– Je peux rentrer en bus.
– Je refuse de te laisser partir, si tu dois t’évanouir dès que tu auras fait un pas dehors. Maintenant, repose-toi !

La femme referma le rideau. Le claquement de ses talons sur le sol carrelé l’accompagna jusqu’à son bureau. Les pages du carnet de correspondance tournées sans précaution crissèrent, puis une conversation étouffée suivit le cliquetis des touches du téléphone.

L’infirmière revint le prévenir que sa tante viendrait le chercher. Elle lui proposa ensuite un cachet d’aspirine et un verre d’eau qu’il accepta sans conviction.

mercredi 23 février 2011

Chapitre 12 de Limonade - Episode 4

Elle s’assit en biais sur les marches de béton froid avant de préciser ses intentions :
– Il est hors de question que je vous révèle quoique ce soit à propos du cours d’approfondissement en histoire et du professeur Kaenel.
– Dans ce cas, tu peux t’en aller.

La réplique de Fabrice figea son compagnon. Ce dernier lui adressa un regard à la fois inquiet et furieux qui disparut face à son sourire en coin. Corentin haussa les épaules, laissant à son ami la conduite de la discussion.
– Je ne vais pas m’en aller parce que j’ai un marché à vous proposer.
– Un marché ?
– Oui. Ton ami muet est exorciste ?

Les deux garçons échangèrent un regard, puis l’intéressé lui répondit :
– Je suis arrivé à annuler un envoûtement. Je ne sais pas si j’arriverais à recommencer.
– Si tu veux sauver ta meilleure amie, il va falloir que tu réussisses. C’est ma condition.
– En gros, je te débarrasse des ombres et tu me dis tout ce qui s’est passé au pensionnat ?

Les lèvres de Charline s’arrondirent de surprise.
– Tu peux voir les ombres ?
– Pas exactement, mais je sais qu’elles sont autour de toi. Tous tes attrapes-rêves, c’est pour les tenir à distance.

Elle acquiesça, plus soulagée que terrifiée.
– Je croyais devenir folle, confessa-t-elle dans un souffle.

Avant que Corentin ne puisse esquisser un geste de réconfort, elle bondit sur ses pieds.
– C’est d’accord ? demanda-t-elle d’une voix trop aiguë.

L’adolescent réfléchit un instant, bien qu’il ait la certitude de ne pas avoir le choix. Les bras de Fabrice entourèrent soudain ses épaules.
– Si tu veux un exorciste, tu n’as qu’à en trouver un autre, dit-il sur un ton espiègle.

Sa joue tiède et à peine piquante appuyait contre l’oreille de Corentin. Ce dernier pouvait sentir la respiration de son ami dans son dos et le sourire qui déformait sa bouche.

La scène arracha Charline à ses sombres pensées. En dépit de ses yeux brillants, elle plaisanta à son tour :
– Sois pas jaloux !
– On essaye le rituel demain après-midi ? proposa l’apprenti exorciste.
– Plutôt le soir, quand mes parents seront au travail.
– J’apporterai mon livre, mais ça serait plus simple si tu t’occupais de l’eau bénite.
– OK. Il en faut combien ?
– Un grand seau, répondit Fabrice du haut de son expérience.

La jeune fille salua ses compagnons, puis tourna les talons. Elle regagna les bâtiments du lycée à grandes enjambées.
– Tu peux me lâcher maintenant, dit Corentin en se tortillant.

Son ami obtempéra, au bord de l’hilarité. Il parvint à retrouver son sérieux au moment où la sonnerie retentit dans la cour. Ils se séparèrent afin de retourner dans leurs salles de classe respectives.

lundi 21 février 2011

Chapitre 12 de Limonade - Episode 3

Au lieu de répondre, Fabrice désigna une silhouette qui traversait la cour afin de les rejoindre. Il murmura :
– Sorcière en approche.

Son ami se retourna pour faire face à Charline Kim qui s’avançait en direction de leur escalier. Elle se trouvait encore trop loin pour les entendre ; il en profita donc pour dire à voix basse :
– Je me demande ce qu’elle nous veut ?
– Nous dire la vérité sur le cours de magie du pensionnat Notre-Dame.
– Ça serait trop beau pour être vrai.

La jeune fille était à présent toute proche. Ils reconnurent les piques de métal plantées dans les bretelles de son sac et sa coiffure ébouriffée à grand renfort de gel. Sa parka violine s’ouvrait sur un top noir orné d’une illustration de chatte aux griffes ensanglantées.
– Sympa ton t-shirt, persifla l’aîné des garçons.

Avec une grimace, Charline écarta les pans de sa veste pour dévoiler le motif dans son intégralité. Un message proclamait « Dress to kill » en lettres de sang et un collier à pointes donnait au félin un air punk.
– C’est une copine parfaite pour ton chat, fit remarquer Fabrice.
– C’est vrai, Lucifer l’aimerait beaucoup.

Bien que cet échange lui demeure hermétique, la nouvelle venue resta debout devant l’escalier. Elle fixait les deux garçons en silence, sans parvenir à les mettre mal à l’aise.
– J’ai une proposition à vous faire, déclara-t-elle.
– Alors, installe-toi.

En réponse à la suggestion de Fabrice, elle fit glisser son sac à terre, puis s’étira. La lisière de son top remonta jusqu’à son nombril et dévoila une bande de peau bistre. Sa poitrine menue déforma légèrement l’illustration qui paraissait hésiter entre le mignon et le gothique.

vendredi 18 février 2011

Chapitre 12 de Limonade - Episode 2

Les garçons s’installèrent à l’écart, sur les marches qui menaient à la cantine. Un ciel gris dans lequel apparaissaient ça et là des trouées bleues recouvrait la ville. En l’absence de vent, les feuilles brunes des arbres de la cour s’accumulaient autour des troncs entourés de grillage.
– Vivement les vacances, dit Fabrice sur un ton maussade.
– Oui. Vendredi soir, on sera tranquille…

La perspective d’une semaine de congés pour la Toussaint était des plus alléchantes. Débarrassé de ses obligations scolaires, Corentin pourrait consacrer davantage de temps à l’étude de la magie wiccante et aux tarots. Il conservait aussi l’espoir de passer du temps en compagnie de Gwenaëlle.

Une vague de nostalgie lui serra le cœur, puis il retourna à ses préoccupations immédiates.
– Tu te souviens du dessin de la ville de cristal ?
– Oui, celui que tu as sorti au cours de maths. Tu m’as représenté dans un genre de labyrinthe.
– Il avait quelque chose de spécial ?
– Pas vraiment, mais j’aimerais savoir si tu as une idée sur ce qu’il signifie. Tu sais, le truc de métaphore…

Fabrice examina la feuille tendue par son compagnon.
– C’est bien moi. Par contre, tout ce qu’il y a autour ne me dit rien du tout.

Avec une pointe d’inquiétude, Corentin récupéra sa création. Il l’observa quelques secondes, puis la remit dans son sac et déclara :
– En général, je dessine lorsque je pense à un truc précis, mais pour celui-là, c’était différent. J’avais l’impression que les images voulaient absolument sortir de ma tête et…
– Continue, l’encouragea son ami.
– J’avais très mal à la tête au début. Je n’arrivais pas à arrêter d’y penser, jusqu’à ce que je le termine.
– Tu as terminé par quoi ?
– Toi.

Devenir le sujet d’un présage ne paraissait pas être au goût de l’adolescent. Ses efforts pour rester calme et détaché n’échappèrent pas à son compagnon quand il suggéra :
– Ce dessin était peut-être une mise en garde.
– Une mise en garde contre quoi ?
– Comment veux-tu que je le sache ! C’est toi le…

Il s’interrompit tout à coup. La confusion qui se lisait sur son visage trahissait ses regrets de s’être laissé emporter. Il s’apprêta à s’excuser, mais Corentin lui sourit.
– Je ne sais pas très bien ce que je suis. Alors, je pense qu’on devrait en rester là.

mercredi 16 février 2011

Chapitre 12 de Limonade - Episode 1

La perspective d’entamer une exténuante journée de cours suffisait à démotiver Corentin. Cependant, la soirée lui avait permis de surmonter la déception causée par le refus de Charline. Il n’avait pas l’intention d’abandonner la première piste sérieuse dont il disposait afin de comprendre ce qu’il était advenu de Gwenaëlle.

Il préférait néanmoins parler à Fabrice de son intention de harceler la lycéenne jusqu’à ce qu’elle lui révèle les mystères auxquels elle avait assisté. Les deux heures de cours qui le séparèrent de la pause lui semblèrent s’étirer en longueur.

La présence d’Aurélien à côté de lui le dissuada de sortir le dessin qu’il désirait soumettre à la sagacité de son ami. La curiosité de son camarade serait impossible à satisfaire s’il apercevait les tours de cristal ou le labyrinthe. De plus, l’adolescent ignorait ce qu’il serait capable d’imager s’il reconnaissait Fabrice au milieu de ce décor fantastique.

Lorsqu’enfin, Corentin put quitter le cours d’espagnol, il s’engouffra en trombe dans l’escalier. Ses yeux bleus arrivaient juste au-dessus des crânes des autres lycéens, il réussit donc à voir son ami arriver de loin. Comme à son habitude, celui-ci portait un sweat-shirt de couleur et un jean aux revers élimés à force de marcher dessus.

Ils échangèrent d’abord un sourire, car le brouhaha autour d’eux les empêchait de parler à moins de se trouver côte à côte.
– Du nouveau ? commença le plus âgé.

L’adolescent haussa les épaules.
– Qu’est-ce que tu aurais voulu qu’il arrive ?
– Charline n’est pas revenue sur sa décision ?

Il secoua la tête en signe de dénégation, puis il lui fit part de son intention de réclamer des explications à la jeune fille. En conclusion, il déclara :
– Pour l’instant, elle est la seule personne qui puisse nous aider à savoir ce qui est arrivé à Gwen.
– J’ai une autre piste, affirma son ami.

Avant que Corentin n’exige des précisions, il poursuivit :
– Je m’occupe de ça mercredi après-midi. Promis, je te dirais ce qu’il en est demain soir.
– D’accord.

lundi 14 février 2011

Un Léo pour la Saint-Valentin

A ma base, je ne comptais pas faire de billet spécial pour la Saint-Valentin. Et puis Vilie m'a envoyé cette très jolie illustration et j'ai eu de la partager sur ce blog. Elle représente le personnage principal de la nouvelle Pandémonium City, Léopold le nécromancien.



Pour ceux qui s'en rappellent, Vilie avait aussi illustré ce billet consacré à l'anthologie Mystère et Mauvais Genres.

vendredi 11 février 2011

Recherches et autres blagues

Une fois n'est pas coutume, je vais faire appel à la science de mes lecteurs. En effet, dans le cadre de la correction des premiers chapitres de Limonade, je me suis rendue compte que je manque de connaissance dans des domaines comme la cartomancie, la magie wiccante ou encore les runes.

Je sais qu'il faut que je me documente sur le sujet, mais je ne sais pas par où commencer. Donc, si vous avez quelques pistes ou connaissances sur le sujet, cela m'aiderait beaucoup.

Merci d'avance et désolée pour l'absence de billet de mercredi dernier.

lundi 7 février 2011

Rue Farfadet

Cette nouveauté des éditions Mnémos faisait partie de mes cadeaux de Noël et, pour une fois, il n’a pas eu le temps de rejoindre ma pile à lire. Après la décevante lecture du roman de space-fantasy « Les yeux d’Opale », j’avais besoin de quelque chose de plus original.

Dès les premières lignes, j’ai été emballée par la féerie urbaine qui imprègne « Rue Farfadet ». La ville qui a servi de modèle est identifiable sans le moindre doute possible et il est amusant de chercher de quels lieux sont inspirés les noms des rues et des quartiers où se déplace le héros. En parlant du héros, celui a pour seul originalité d’être un non-humain : un elfe banni de sa forêt pour un crime dont le lecteur ignore tout (et qui ne sera pas révélé).

Si l’intrigue policière et la manière dont se déroule le récit sont des directement inspirées roman noir. Pourtant, l’ambiance XIXe est suffisamment bien rendue pour ne pas se laisser éclipser et apporter une touche d’originalité au roman. Les elfes et autres créatures qui peuplent cette cité sont variées et sympathique. Cela ne m’a pas surpris de trouver un mot de remerciement à Pierre Dubois pour la qualité de ses ouvrages sur le Petit Peuple.

Pour une fois, je n’ai rien à redire à la quatrième de couverture mise à disposition par l’éditeur. Je vous la livre donc telle quelle :
« Panam, dans les années 1880 : les humains ont repris depuis longtemps la main sur les Peuples Anciens. Sylvo Sylvain a posé son havresac dans la rue Farfadet, gouailleuse à souhait. Chapeau melon vissé sur le crâne, clope au bec, en compagnie de son fidèle ami Pixel, il exerce la profession exaltante de détective privé et les affaires sont nombreuses ! Des adultères à photographier, des maris jaloux, des femmes trompées, etc. Ni très rémunérateur, ni très glorieux que tout ceci. Alors, Sylvo fréquente assidûment les bars, les cafés et les lieux de plaisir en tout genre où son charme envoûte ces dames...
Jusqu’au jour où, lors d’une banale enquête de routine, il se trouve mêlé à une machination dépassant l’entendement. Le voilà, bien malgré lui, chargé de l’affaire par l’un des trois puissants ducs de Panam. Saura-t-il tirer son épingle de ce jeu compliqué et dangereux ? »

En conclusion, je dirais que ce livre est une vraie réussite pour peu que l’on aime les romans policiers classiques. Tellement classique selon moi que l’un des rebondissements majeurs est tombé à plat.

vendredi 4 février 2011

Chapitre 11 de Limonade - The end

Pour une fois, le chapitre s'est focalisé sur Gwenaëlle et ses consoeurs. J'ai pensé que son point de vue éclaircirait pas mal de choses, même s'il détonne à côté de ceux de Corentin et Fabrice. J'espère que la différence est visible, tout en restant dans la continuité du roman.

C'est le moment de réclamer des chapitres consacrés aux autres personnages, puisque mon avance s'est considérablement réduite cet hiver. D'ailleurs, les commentaires sont toujours les bienvenus si vous avez des remarques (bonne/mauvaise) ou des erreurs à signaler.

Et comme d'habitude, vous pouvez retrouver le début de ce chapitre en cliquant ici. Le chapitre 12 débutera le 14 février, alors en attendant je vais poster quelques morceaux de blabla et des critiques de livres.

mercredi 2 février 2011

Chapitre 11 de Limonade - Episode 8

Anne-So mit fin à l’examen du schéma et s’excusa avec tant de détours que, en fin de compte, il ne s’agissait même plus d’excuses.
– Tu as dû être mal informée, susurra Gwenaëlle avec des intonations aussi sucrées que perfides.
– Ça me surprendrait beaucoup.

La confiance que son aînée témoignait à son rapporteur était des plus intrigantes. La plus jeune des sorcières se promit d’investiguer dans cette voie. Elle n’eut pas le temps de passer en revue des mouchards potentiels, car la porte de la salle s’ouvrit dans un grincement.

Sur le seuil se tenait une silhouette masculine.
– Maître, saluèrent simultanément les deux lycéennes.

Il leur répondit par une inclinaison de la tête. Les mèches mi-longues qui encadraient son visage lui glissèrent devant les yeux. Il les remit en place avec une négligence raffinée, puis s’adressa à Gwen :
– Tu as fait bon usage de la coupe de vision ?
– Oui. Je peux vous la rendre dès maintenant, si vous la voulez.
– Non, c’est bon. Tu peux la garder encore quelque temps.

La jeune fille savoura l’attention que lui portait leur professeur aux dépens de sa rivale. Lorsque celui-ci la pria de le suivre, sa fierté augmenta encore d’un cran. Elle quitta la pièce sous le regard courroucé d’Anne-So à laquelle incombait désormais la tâche de remettre les tables et le pendule à leurs places respectives.