vendredi 15 janvier 2010

Chapitre 1 de Limonade - Episode 13

Le lendemain matin, Corentin eut la surprise de devenir le centre de l’attention des élèves qui bavardaient devant le lycée lorsque Fabrice le déposa sur le trottoir. Après l’avoir salué d’un geste de la main, il se glissa dans le flot passant sous le portail métallique. Pour se rejoindre sa salle, il devait encore traverser l’espace goudronné et planté d’arbres malingres qui faisait office de cour.

Par habitude, il jet un regard au tableau où étaient inscrits les noms des professeurs absents. Il avait cessé d’espérer que son professeur de mathématiques y figure. Cependant, les chances qu’il soit dispensé des cours de géographie ou d’espagnol étaient loin d’être nulles.

Ne reconnaissant aucun nom familier au milieu des hiéroglyphes des surveillants, il gravit les marches quatre à quatre jusqu’au troisième étage. Dans le couloir, les portes des salles étaient toutes semblables. Seul le numéro écrit sur les murs beiges permettait de les différencier.

Arrivé devant la salle de mathématique 115, Corentin soupira. Il était le dernier à entrer et reçut comme punition de se placer au premier rang. Il eut néanmoins la possibilité de se placer à côté de la fenêtre donnant sur la cour.

Depuis le début de l’année, il n’avait pas fait preuve de beaucoup de talent en matière d’arithmétique. Pourtant, monsieur Joly, son professeur, refusait de le laisser décrocher. À plusieurs reprises, il avait surpris Corentin en train de dessiner au lieu de recopier le cours et l’avait gentiment réprimandé.

Devant tant de bonne volonté, l’adolescent avait fini par s’efforcer d’être un peu plus assidu, ou au moins de mieux cacher ses dessins. Mais il avait beau encadrer les formules en rouge, les identités remarquables refusaient de s’imprimer dans son cerveau. Les a, les b et les carrés étaient très vite remplacés par des serpents.

À la fin de la matinée, il en avait dessiné deux de plus, toujours entrelacés. Démoralisé par ces reptiles qui avaient colonisé son imaginaire, il laissa son regard se perdre dans les silhouettes décharnées des arbres de la cour. Il y en avait huit, sélectionné pour leur résistance plutôt que pour leur beauté. Au bout des branches fines subsistaient les dernières feuilles à avoir échappé à la tempête de la veille.

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