À peu près à la même heure, Corentin leva les yeux des feuilles éparpillées et du livre de mathématiques ouvert devant lui. Il avait beau insister, le programme de révision que monsieur Joly lui avait demandé de préparer en vue du cours du samedi matin demeurait incroyablement obscur. Quel que soit le temps qu’il y consacrait, il était incapable de trouver la moindre bribe de solution à ces exercices.
En revanche, des images se bousculaient dans son esprit et le distrayaient sans cesse de ses cours d’algèbre. Il refusa de s’abandonner à ses visions de cités évanescentes, mais celles-ci s’imposèrent jusqu’à lui donner la migraine.
Résigné, il sortit un crayon gris de sa trousse et le laissa glisser sur une feuille de brouillon. Sous la pointe de graphite, de fantastiques tours cristallines apparurent, dressées vers le ciel tandis que leurs bases se perdaient dans un flou grisâtre, à peine esquissé.
Corentin considéra un moment sa création avec le sentiment qu’elle n’était pas achevée. Il rangea le crayon et opta pour un portemine afin de dissiper le brouillard qui recouvrait le niveau inférieur du dessin.
Alors que les premiers traits lui étaient venus spontanément, il hésitait à présent sur la manière de procéder. Il fit l’effort de poursuivre les visions qui s’imposaient à lui, après avoir tenté de les repousser pendant des années.
Peu à peu, les détails apparurent avec une précision tranchante dans les brumes crayonnées d’une mine trop épaisse. L’architecture fabuleuse des tours se poursuivait plus bas, toujours aussi translucide. Cependant, les formes dessinées devinrent plus tortueuses, plus hésitantes. Elles finirent par former un véritable labyrinthe cristallin dans lequel se perdaient les reflets indistincts de visages.
lundi 24 mai 2010
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