Le lendemain matin, ce fut avec les yeux cernés et une angoisse lancinante au creux de la poitrine que Corentin se rendit au lycée. Il avait beau de se répéter en boucle les paroles rassurantes de sa tante, il ne parvenait pas à adopter une confiance sans faille envers Fabrice. Rien ne lui garantissait que ce dernier n’ait pas raconté autour de lui l’expérience à laquelle il avait été soumis la veille. Dans ce cas, l’adolescent pouvait faire une croix sur sa tranquillité et son anonymat.
Comme un rappel de sa mauvaise conscience, il aperçut Fabrice sur sa moto à quelques mètres seulement de l’entrée de l’établissement. Afin d’éviter de le croiser, il resta tapi contre un platane avec l’espoir qu’il gare son véhicule aussitôt.
Le fait qu’avoir représenté son ami dans l’une de ses étranges créations n’avait rien pour le rassurer. Jusqu’à présent, le seul personnage réel qui apparaissait dans ses dessins était Gwenaëlle. Comme s’il s’obstinait à capter les personnes auxquelles il était attaché et qui lui échappaient.
Après de longues minutes, le dos appuyé contre l’écorce rugueuse et les mains enfoncées dans les poches, Corentin prit la décision de se confronter à ses inquiétudes. Pourtant, quand il réalisa que Fabrice avait disparu, il en éprouva un sentiment fugace de soulagement. Ses résolutions s’effritèrent dès qu’il eut pénétré dans la cour.
Les gestes habituels noyèrent son impression de vivre dans un univers à la fois semblable et subtilement différent de celui du commun des mortels. Sauf qu’à présent, il disposait de justifications tangibles à ce décalage.
Désireux d’évaluer ses capacités, il s’interrogea sur une éventuelle absence de son professeur de mathématiques. Il passa ensuite en revue tous ses cours de la journée, les paupières mi-closes devant le tableau des absents. Les lycéens pressés le bousculèrent, mais il était trop concentré pour leur prêter attention.
Une fois son inventaire terminé, il ouvrit les yeux. En accord avec ses prévisions, son professeur de SVT figurait parmi les absents. Étant donné que monsieur Brésillot, le professeur en question, était malade depuis une semaine, Corentin était moyennement convaincu de l’existence de son don de prescience.
lundi 8 novembre 2010
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